David Lisnard était l’invité de Sonia Mabrouk dans la matinale de CNews/Europe 1.
David Lisnard salue le réveil du gouvernement, mais selon lui, sans réforme de fond et sans rupture avec le déni, la maîtrise de la dépense publique restera un mirage. Une tribune à retrouver dans le JDNews.

Réjouissons-nous : le gouvernement semble enfin prendre conscience de l’ampleur du désastre budgétaire et sortir du déni entretenu depuis des années au plus haut sommet de l’État. Sommes-nous pour autant sortis des postures, des discours et des effets d’annonce ? La convocation d’un « comité d’alerte » par le Premier ministre et l’annonce de 40 milliards d’euros d’économies sur le budget 2026 ne sauraient masquer la réalité : aucun plan crédible n’est sur la table. Et ce, pour une raison qui touche au cœur même de la matrice de l’État : tout comme elle complique jusqu’aux plans de simplification, la technocratie à la manœuvre rend impossible toute remise en cause réelle de la dépense publique.
Chaque tentative d’économie se traduit par de nouveaux impôts, de nouveaux dispositifs, de nouveaux acteurs publics, qui alourdissent le poids de l’État. On l’a bien vu avec le budget 2025 : quand le gouvernement annonce des économies, il s’agit d’augmentation d’impôts et d’un ralentissement de l’augmentation de la dépense, dépense qui atteint 1 695 milliards. Depuis 2017, la politique du « n’importe quoi qu’il en coûte », successivement attribué au Covid ou à la guerre en Ukraine, a conduit à une augmentation de la dette de 1 000 milliards, pour atteindre plus de 3 300 milliards : une progression de 46 %, quand la richesse nationale n’a crû que de 27 %.
Créer une spirale vertueuse
Dans le même temps, les autres pays européens ont maîtrisé leur endettement. Si nous nous étions contentés de suivre la trajectoire moyenne de la zone euro, nous aurions aujourd’hui 400 milliards de dette en moins et des charges d’intérêts divisées par deux. Pour financer cette dérive, l’État devra lever plus de 300 milliards sur les marchés financiers, après avoir déjà battu un record à 285 milliards en 2024. Comment prétendre défendre la souveraineté nationale si notre survie budgétaire dépend du bon vouloir de nos créanciers ? Dans ce contexte, les collectivités locales sont désignées comme les vilains petits canards de la dépense publique. Bien qu’elles doivent évidemment participer au redressement national et qu’il existe des collectivités mal gérées, ce procès est infondé.
L’État ne peut pas leur demander de dépenser moins, tout en leur imposant de dépenser plus : car on leur demande de doubler leurs investissements annuels à 20 milliards pour respecter les objectifs de la stratégie bas carbone, on leur impose la hausse du point d’indice des fonctionnaires, l’augmentation de 13 points (!) entre 2023 et 2028 des cotisations retraites à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) pour un coût supplémentaire de 1,2 milliard dès 2025 alors même que l’État y a déjà pioché 100 milliards depuis cinquante ans pour alimenter d’autres régimes déficitaires, des transferts de compétences non financés (gestion des digues, des routes, service public de la petite enfance), ou encore le fardeau du décret tertiaire, estimé à 5,2 milliards par an pendant dix ans. La réalité est simple : 19 % de la dépense publique relèvent des collectivités locales (34 % en Europe), contre 31 % pour l’État, tandis que les dépenses sociales représentent 50 %, soit près d’un tiers du PIB. La France dépense 260 milliards de plus que la moyenne de la zone euro pour des résultats inférieurs en matière d’éducation, de santé, de logement ou de sécurité.
À force d’entretenir l’illusion que l’on peut consommer sans produire, redistribuer sans créer, et prélever toujours plus sans fragiliser la compétitivité, nos dirigeants ont créé les conditions de notre décrochage économique et social. Cette situation est l’aboutissement d’un modèle social étatiste qui ruine le pays depuis plus de quarante ans, avec des prélèvements obligatoires entre 44 et 46 % du PIB qui, loin de rétablir l’équilibre, étouffent l’économie, freinent l’investissement, découragent le travail et affaiblissent l’innovation. Tout l’enjeu est de renouer avec une spirale vertueuse entre réduction massive de la dépense publique, déréglementation et allègement des impôts pesant sur les contribuables, pour sortir de l’effet descendant de la courbe de Laffer, car trop d’impôt tue l’impôt et finit par nuire au service public. C’est sur quoi nous travaillons avec Nouvelle Énergie, avec un plan d’économies de 200 milliards par an sur un quinquennat et une volonté de parvenir à 300 milliards. Mais ceci n’est qu’un moyen : l’objectif est de relancer la production de richesse pour, à terme, faire croître le PIB plus vite que les dépenses publiques et réduire durablement leur poids dans notre économie.
Pour cela, l’urgence est d’abord de réformer l’État pour réduire durablement la dépense et le rendre plus fort en réduisant son périmètre d’action. Cela passe par la suppression des agences inutiles, l’élimination des doublons, la réduction du millefeuille territorial, l’abrogation des normes qui paralysent l’initiative et la concentration des moyens sur les missions régaliennes, le respect de la subsidiarité ascendante, le transfert des pouvoirs réglementaires de l’État aux collectivités. Il nous faudra supprimer les 600 000 postes administratifs de trop, privatiser tout ce qui peut l’être, introduire de la concurrence dans le fonctionnement des administrations et collectivités, réduire les fonctions dites support, souvent productives de process contraignants, coûteux et inutiles, cibler le non-remplacement des départs en retraite, lutter contre l’absentéisme, et instaurer une culture de la responsabilité, indispensable dans l’administration.
En finir avec le rabot et l’impôt
En somme, moins d’État bureaucratique, plus d’État régalien. Moins de contrôle, plus d’action, moins d’administration, plus de liberté et de responsabilité. Cette réforme doit s’articuler avec une refonte de notre modèle social : allocation sociale unique plafonnée, lutte systématique contre la fraude. La convergence des régimes de retraite public et privé, la limitation de l’indexation des pensions élevées, la suppression de l’abattement fiscal de 10 % et l’introduction progressive d’un étage obligatoire de capitalisation indispensable pour garantir la pérennité du système. À ces réformes structurelles s’ajoutent des mesures immédiates : limitation de l’accès aux prestations non contributives aux seuls nationaux, suppression de l’AME, refonte totale de la politique du logement, rationalisation des aides aux entreprises, diminution des subventions aux associations, recentrage de l’Assurance maladie sur les soins essentiels sans remise en cause du principe de l’universalité des remboursements.
Ce plan de redressement n’est pas un catalogue de coupes budgétaires. Il faut en finir soit avec le laxisme budgétaire, soit avec le rabot et l’impôt. Il est temps de déployer une vision par missions, objectifs et gestion de projets, avec sens de l’exécution et évaluation au sein de l’État. Chaque économie doit se traduire par une amélioration du niveau de vie des actifs, un soutien à l’investissement productif et un renforcement des missions fondamentales de l’État. L’enjeu n’est pas financier. Il est existentiel. La France ne peut plus se payer le luxe du déni et de la procrastination. C’est non seulement possible, mais indispensable pour rendre à la France les moyens de sa prospérité et de sa liberté.



Retrouvez la chronique de David Lisnard pour L’Opinion.


Retrouvez l’intégralité de son interview à partir de 56’20.

La séance du Conseil Municipal s’est tenue lundi 7 avril.


Retrouvez l’interview de David Lisnard pour Atlantico, à l’occasion de la parution de son livre « Ainsi va la France ».

La Mairie de Cannes, très proactive sur le sujet du harcèlement scolaire et extrascolaire, a noué un partenariat avec l’association « Marion la main tendue », présidée par Nora Tirane-Fraisse, pour organiser une série d’événements, dont un grand colloque national au mois de juin.

Retrouvez l’intégralité de son interview.
Selon une étude publiée ce 8 avril, les Français sont de moins en moins enclins à lire, surtout les jeunes. David Lisnard et l’enseignante Lisa Kamen-Hirsig arguent que ni les livres récents ni leur enseignement ne donnent envie de lire. Une tribune parue dans Le Figaro.

Le 8 avril, le Centre national du livre (CNL) a publié le 8 avril son baromètre de la lecture 2025. Conclusion : les Français lisent de moins en moins. Et lorsqu’on se penche sur les résultats détaillés, le phénomène est encore plus flagrant chez les jeunes qui lisent très peu et sont 32 % à déclarer envoyer des messages en même temps qu’ils parcourent un livre… Même la bande dessinée marque le pas au profit des mangas et des romans sentimentaux. Bref, journalistes, responsables politiques, professeurs, parents, tout le monde le déplore : les jeunes ne lisent plus !
Glissons-nous quelques minutes dans la peau d’un jeune élève, en âge de découvrir les merveilles de la littérature et la joie de trouver des réponses hors de lui-même, dans la fréquentation d’amis moins transitoires et plus profonds que ses camarades d’écoles : les personnages et leurs auteurs. Imaginez que vous ayez six ou huit ans dans la France d’aujourd’hui. Vos fesses sont vissées sur une chaise six heures par jour, pendant que votre enseignant s’échine à vous extraire de votre ignorance en vous apprenant à lire. Croit-il ! Car lui-même n’a pas forcément compris que la méthode qu’il utilise n’est pas efficace. En effet, la méthode mixte – semi-globale donc – est encore dominante dans les écoles, si répandue que malgré vos efforts, vous rencontrez d’énormes difficultés à maîtriser les correspondances entre ce qui se dit et ce qui s’écrit. Vous êtes condamné à deviner les mots…
Chacune de vos lectures est suivie de tests, de QCM, de consignes exécutives comme : «Dessine dans le cadre le personnage tel qu’il est décrit page douze» ou encore de mots croisés, de travaux de groupes, d’exposés et de «rallyes». Rien n’est jamais gratuit. La lecture n’est pas un cadeau mais un exercice, une évaluation permanente. On vous demande même de lire des textes le plus rapidement possible. Vous savez bien, comme tous vos amis, que vous devez réussir le test de fluence, sinon vos parents seront convoqués pour leur signaler un problème. L’angoisse ! Alors la ponctuation et la respiration (qui donne aussi son sens à un texte) passent à la trappe.
Votre enseignant, se conformant aux listes publiées par l’Éducation nationale, soucieux de satisfaire sa hiérarchie plus que de vous instruire, vous demande de lire Monsieur Crocodile a beaucoup faim, Mon prof est un troll ou Cent Culottes et sans papier. Il vous fait apprendre des poèmes mièvres, qui ne riment pas. C’est un principe : la rime, c’est classique, le classicisme est une violence de classe. Les poèmes retenus sont surréalistes, parfois écrits par des enseignants et publiés sur leurs blogs, parlent d’oiseaux qui pondent des œufs tout blancs à l’infini ou des valeurs olympiques. Ils n’évoquent jamais la mythologie, les contes, les fables ou la grande littérature du 19e siècle parce qu’elle n’est pas assez engagée à ses yeux. Il s’est convaincu que tout cela était violent, sexiste et qu’une langue recherchée favorisait le fils de bourgeois ayant appris à parler avec ses parents. C’est l’inspecteur qui l’a dit.
Lorsque vos parents apprenaient par cœur Ronsard ou lisaient La Bergère et le ramoneur,ils intégraient le sujet inversé, le passé simple, le subjonctif et des centaines de mots précis ayant leur place dans une pensée articulée. On vous prive de cette richesse et de cet héritage au nom de la sacro-sainte lutte contre les inégalités. Vous faites les frais des délires idéologiques. On vous emmène dans des bibliothèques où se succèdent des animations : semaine du polar, de la littérature scandinave, des écrivaines ou des mots en ouille. À aucun moment on ne cultive chez vous le goût du silence, de l’intériorité, le plaisir de la solitude. La lecture aussi est intégrée au «vivre-ensemble». Il n’y a plus de refuge, plus d’ermitage… Quelle plaie !
Avant votre naissance, une ministre progressiste a décrété que chaque classe de France serait pourvue d’écrans. Il y en a partout au motif qu’il faut lutter contre la fracture numérique. Lutter, toujours lutter : ça donne l’impression d’être concerné préoccupé par la misère du monde… Peu nombreux sont ceux qui ont relevé que c’étaient justement les élèves des familles modestes qui passaient le plus de temps sur écrans et qu’il n’était pas nécessaire de leur en imposer à l’école.
Certains professeurs pensent que «chancelant» est de la famille de chance ou de chanteur et commettent des erreurs d’orthographe un peu partout.. Vous le voyez, vous le savez car malgré tout, votre intelligence résiste ! Vous comprenez qu’un nombre croissant d’entre eux a été recruté malgré leur inculture, parce que personne ne veut faire ce métier. Vous n’avez aucune envie de leur ressembler. Terminée l’exemplarité.
Il y a quelques jours, votre école Jean de La Fontaine a été renommée Boris Vian. Le collège d’à côté s’appelle Angela Davis. Tout se vaut. Le beau, le vrai, le bien ne sont plus que des appréciations relatives. Vous vous glissez dans cette modernité. À quoi bon résister, seul contre ce relativisme et ce culte du «progrès» ? L’école vous impose «un quart d’heure de lecture par jour» entre 13h30 et 13h45. C’est à peu près la même corvée que se laver les dents ou aider maman à mettre la table. La maîtresse vous observe du coin de l’œil : alors vous tournez les pages sans faire attention.
On vous assure que lire Harry Potter est formidable, que «ça peut mener à la littérature». On harrypotterise votre classe, vos cahiers, votre cerveau. Après quelques années de ce régime, vous n’êtes plus capable de supporter une description de plus de quatre lignes, la profondeur psychologique des personnages ne vous intéresse pas. Le style non plus. Vous finissez par regarder les films et acheter la littérature pour ados du même tonneau : des jeunes filles anorexiques ont des superpouvoirs et ça finit bien.
On vous enseigne très peu et très mal la grammaire, le vocabulaire. Les mots ne vous semblent pas toujours à leur place dans les phrases que vous lisez. Il suffit qu’un sujet soit inversé pour que vous le preniez pour un complément d’objet direct. Mais qui est là pour vous détromper ? Vous ne le savez pas mais en quarante ans, les élèves ont perdu environ 600 heures d’enseignement de la langue française entre le CP et la seconde…
Ah oui, j’oubliais : vos parents, vos professeurs, les surveillants, tout le monde est vissé sur son téléphone à longueur de temps. Vous en concluez logiquement – mais qui ne le ferait pas ? – que c’est cela qui est désirable. Car ces gens-là, les adultes, sont libres, vous le savez. Et que font-ils de cette liberté ? En profitent-ils pour se jeter dans les bras de Maupassant, de Milan Kundera ou de Pierre Michon ? Entretiennent-ils un journal ? Non non, ils jouent à Candy Crush, font défiler des vidéos «sur Instagram».
Pourtant, vous sentez confusément qu’on vous prive d’un bonheur, «qu’il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. » (Marcel Proust. Sur la lecture) Vous ne pouvez pas savoir que les sangs mêlés d’Achille, de Cosette et du Petit Chose coulent dans vos veines, que vous pouvez pleurer avec Cadichon, Perrette ou Gervaise, mais ils vous manquent. Après cette petite expérience de transfuge corporel, vous soupirerez peut-être encore que «les jeunes ne lisent plus». Mais comment pourraient-ils apprécier la lecture alors que tout conspire à les en dégoûter ? Apprenons leur déjà à déchiffrer correctement leur langue, à l’aide de méthodes purement syllabiques. Cessons d’occuper le temps scolaire avec des activités ludiques et de faire de l’école un lieu de combat contre les inégalités : édifions nos enfants par la littérature classique. Exigeons que les enseignants y soient formés, ainsi qu’à la grammaire et à l’histoire de leur langue.
Sur tous les sujets, David Lisnard martèle que « la vraie réponse est avant tout libérale ». Pour son dernier essai, il choisit un sous-titre – « Manifeste libéral »- on ne peut plus explicite. Et suscite l’enthousiasme. Une chronique de Mathieu Laine à retrouver dans Les Echos.

Retrouvez l’article sur le site des Les Échos.